🎧 Ces fausses rumeurs autour de l’Examen d’État 2025

Depuis de nombreuses années, la période de publication des résultats de l’Examen d’État (Exetat), équivalent du baccalauréat en République démocratique du Congo, est marquée par une montée de désinformation. Cette année, les fausses rumeurs ont été alimentées par la rapidité du processus de correction. Sur les réseaux sociaux, cette célérité a suscité une vive polémique et une vague de rumeurs. Pourtant, les recherches menées par notre équipe de vérification des faits, Vunja Uongo, montrent que la majorité de ces affirmations sont fausses. Décryptage.

La session ordinaire de l’Examen d’État (Exétat) a été organisée du 28 au 31 juillet. Le 4 août, soit seulement quatre jours après la fin des épreuves, les premiers résultats ont été publiés. Selon les services du ministère de l’Éducation nationale, cette publication rapide a été rendue possible grâce au renforcement des ressources humaines, matérielles et financières.

Sur les réseaux sociaux, cette annonce en un temps record a attisé les soupçons, certains accusant le ministère de manipuler les chiffres. D’autres ont affirmé que cette célérité était impossible à cause des jours fériés et du week-end. Selon leur raisonnement, la compilation des items ne pouvait commencer que le lundi 3 août, étant donné que le vendredi 1er août était un jour férié et que l’administration publique en RDC ne fonctionne pas les samedis et dimanches.

Mais cette version a été clarifiée par l’Inspecteur général à l’Education nationale (IGE), Hubert Kinzomba, que nous avons contacté. « C’est une fausse rumeur. Nous travaillons tous les jours lorsque nous sommes en phase de composition, d’impression, de passation et de passation [de l’Exétat]. Nous ne connaissons pas de jours fériés, moins encore de dimanche », a-t-il expliqué.

Une autre raison de cette accélération est l’introduction de nouvelles technologies. Pour la première fois, la correction s’est faite dans  trois centres et pas dans une : Kinshasa, Lubumbashi et Mbuji-Mayi. Selon le cabinet de la ministre Raïssa Malu, ces centres sont équipés de machines de nouvelle génération capables de scanner les copies à une vitesse impressionnante, jusqu’à 80 copies par seconde, grâce notamment à l’intelligence artificielle.

ChatGPT n’a pas été utilisé dans la correction

L’usage de l’intelligence artificielle dans la phase de correction a également été sujet à plusieurs controverses. Certaines rumeurs ont prétendu que ChatGPT a été utilisé pour corriger les épreuves, entraînant des erreurs de délibération. « C’est une fausse information », a réagi Maurice Kiala, conseiller en communication au cabinet de la ministre Malu.

L’Inspecteur générale à l’Education nationale Hubert Kinzomba a précisé que le logiciel utilisé pour la correction n’est pas ChatGPT. Ceci est un modèle de langage développé par l’entreprise américaine d’intelligence artificielle OpenAI. A la place, le ministère de l’Éducation nationale a déployé le logiciel S-Note manager qui intègre l’IA. Ce logiciel, conçu localement avec le concours d’un prestataire congolais, a remplacé Data Scan.

Selon M. Kinzomba, S-Note manager présente plusieurs avantages. Il prend en compte les points obtenus par l’élève durant l’année scolaire régulière et les épreuves préliminaires. L’outil est également capable de comprendre les erreurs courantes de remplissage de grilles, réduisant ainsi les délais de correction. Enfin, il permet d’intégrer les résultats des épreuves techniques. « Ces innovations permettent d’obtenir rapidement les premières tendances des résultats, qui sont ensuite contrôlées », a recadré l’Inspecteur général.  

La fausse annonce de l’annulation des résultats

Concernant les rumeurs d’élèves déclarés lauréats sans avoir passé l’examen, Hubert Kinzomba a affirmé qu’aucun élève ne peut réussir sans avoir participé aux quatre jours d’épreuves, demandant des preuves aux personnes qui véhiculent cette désinformation. « Avec notre système, on ne peut jamais publier un enfant mort » avant la fin des épreuves, a-t-il insisté.

Face à toutes ces rumeurs, un communiqué est devenu viral, annonçant l’annulation des résultats de l’Exetat en raison d’une « irrégularité majeure ». Une observation poussée du document a permis de relever plusieurs incohérences, parmi lesquelles l’intitulé « Ministère de l’Enseignement primaire, secondaire et technique ». Une nomenclature qui n’existe plus depuis juin 2024, ce département gouvernemental étant désormais nommé « Ministère de l’Éducation nationale et initiation à la nouvelle citoyenneté ».

De plus, le cabinet de la ministre Raissa Malu a qualifié le communiqué de « fake news ». « C’est un faux communiqué. Lorsqu’il y a un communiqué, il faut bien l’analyser, ce communiqué n’avait pas la dénomination du ministère de l’Education nationale mais celui de l’EPST », a fait observer, pour sa part, l’IG Kinzomba.

Une dernière rumeur en circulation a prétendu que les résultats seraient publiés depuis le Canada. Une autre affirmation erronée. Vunja Uongo, notre cellule de vérification des faits, a visité le Centre national de correction, installé à l’imprimerie de l’Inspection générale de l’Éducation à Kinshasa.

Sur place, elle a constaté que les opérations se déroulent normalement. « Une fois le scannage et la délibération terminés, les résultats sont encodés sur un serveur auquel les réseaux de télécommunication ont accès », a expliqué, pour sa part, un des responsables de la société qui a déployé le logiciel S-Note manager, sous le sceau de l’anonymat en raison de la clause de confidentialité.

A l’heure actuelle, la publication des résultats de l’Exetat 2025 se poursuit à travers les 60 provinces éducationnelles du pays. A ce jour, toutes les malles, y compris celles des provinces éducationnelles du Nord-Kivu 1 et Sud-Kivu 1, deux entités sous contrôle des rebelles du M23, ont déjà atteint les centres de correction.

Dans ce contexte, il est essentiel de rester vigilant face à la désinformation. À l’ère de l’intelligence artificielle, qui ne se résume pas à ChatGPT, la prudence reste de mise : avant de croire ou de partager une information, il faut toujours vérifier sa source.

La rumeur de la semaine est une rubrique pour décrypter les fausses informations qui circulent sur nos réseaux sociaux et au sein de nos communautés locales sur le terrain.