Depuis trente ans, les guerres et rébellions dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC) ne font pas que décimer des vies humaines. Elles détruisent aussi la nature. Entre les armes abandonnées, la pression des populations déplacées sur les aires protégées et la surexploitation de terres agricoles, les conséquences environnementales des violences armées sont alarmantes.
Dans la province du Nord-Kivu, la ville de Goma et plusieurs territoires sont passés, depuis fin janvier, sous le contrôle de l’Alliance Fleuve Congo-M23, un mouvement politico-militaire opposé au pouvoir du président Félix Tshisekedi. Après les affrontements avec l’armée loyaliste, de nombreuses armes ont été abandonnées, causant des accidents et des drames parmi les populations. Une situation qui se répète depuis les conflits armés et rebellions des années 1990.
« Nous vivons dans un environnement qui n’est plus sain à cause de la multiplicité des engins explosifs improvisés et de la prolifération des armes légères sur l’ensemble du territoire », explique Clément Kubuya, chef de poste principal de la Commission nationale de contrôle des armes légères et de petit calibre (CNC-ALPC) à Walikale, dans le Nord-Kivu. Il précise qu’« après l’avancée de la rébellion du M23, installée à Walikale-Centre, beaucoup d’engins explosifs de différents types et de diverses provenances ont été introduits », citant notamment des mortiers 60 et 82, des roquettes RPG-7 et des grenades de tout genre.
Parmi les populations ayant fui les violences, certaines ont trouvé refuge dans le parc des Virunga, classé patrimoine mondial de l’UNESCO. Ce site centenaire subit une forte pression : les déplacés, confrontés à la précarité, dépendent désormais de la faune et de la flore pour survivre. « L’état des lieux n’est pas totalement bon. Une partie du parc est occupée depuis plusieurs années par des groupes armés, ce qui perturbe son fonctionnement normal et a conduit à la suspension des activités touristiques », déplore Méthode Bagurubumwe, chargé des relations publiques au parc des Virunga.
« Tant que la paix ne sera pas revenue, les animaux et toute la biodiversité resteront fragiles dans cette partie de l’Est de la RDC »
Méthode Bagurubumwe, chargé des relations publiques au parc des Virunga.
Il rappelle que ces activités étaient essentielles au développement du parc et des communautés riveraines, et regrette la mort de plus de 200 employés du parc, tués dans l’exercice de leur mission de protection. M. Bagurubumwe dénonce également le braconnage et la pêche illicite dans le lac Édouard, l’un des plus poissonneux du monde. « Tant que la paix ne sera pas revenue, les animaux et toute la biodiversité resteront fragiles dans cette partie de l’Est de la RDC », ajoute-t-il.
Dans la ville de Kitchanga, dans le territoire de Masisi, les terres cultivables sont surexploités et les activités agricoles tournent au ralenti. « Aujourd’hui, la production vivrière ne marche plus bien. Il n’y a plus d’acheteurs ni d’investisseurs agricoles. Avant la guerre, il y avait des coopératives, des concessionnaires et des entrepôts agricoles, mais il y en a plus actuellement », explique Innocent Bwira, agronome à Kitchanga.
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