Des milliers d’enseignants restent sur la liste d’attente pour la retraite en RDC© AFP/HABIBOU BANGRE
Une enseignante devant une salle de classe dans la province du Katanga au sud-est de la République démocratique du Congo

Des milliers d’enseignants restent sur la liste d’attente pour la retraite en RDC

En RDC, plus de 80.000 enseignants vont aller progressivement à la retraite. Le ministère de l’enseignement primaire, secondaire et technique (EPST) a lancé l’opération depuis début août 2021. Mais l’incertitude gagne les intéressés. L’effectivité, mais aussi les allocations de la retraite demeurent leur principale préoccupation. Par ailleurs, la question de la relève se pose. Et des jeunes enseignants s’apprêtent.

Augustine Lengo, 83 ans, est nouvellement retraitée. C’est la première année où elle ne va pas enseigner après plus de 30 ans de service. « Maman Malongi » comme on l’appelle dans son quartier de la commune de Lemba, a pris part, avec ses paires, à la cérémonie officielle du 02 aout qui a sonné le glas de leur carrière enseignante. Mais aujourd’hui, elle est sans travail mais aussi sans allocations de retraite promises par le ministère de l’EPST. « On nous a dit que nous allons percevoir 2500 dollars et cela doit passer par le circuit bancaire. Mais nous n’avons rien reçu jusqu’aujourd’hui » regrette-elle d’un ton amer.

Au ministère de l’EPST, on précise que le montant qu’évoque Augustine n’a rien d’une allocation de fin de carrière. Pour Ludovic Liandja, directeur au service des pensions et rente de survie, il s’agit d’un cadeau offert par le ministère. « Tout ce que l’Etat doit faire, c’est donner de l’argent à la direction (pensions et rentes de survie ndlr) pour qu’elle paie les allocations de fin de carrière mais aussi la pension mensuelle », indique madame Liandja.

Inexistence d’une caisse de retraite               

Des associations actives dans le secteur de l’éducation fustigent le manque d’une caisse de retraite pour enseignants. «Les enseignants qui n’ont pas cotisé pour une caisse de retraite… Donc il y a de sérieuses craintes que la pension de retraite ne soit pas payée », déplore Jacques Tshimbalanga, coordonnateur de la Coalition Nationale pour l’éducation pour tous, (CONEPT). Il considère que la question de la mise à la retraite n’a pas été suffisamment étudiée.

Cette caisse de retraite a finalement été rendue opérationnelle au mois d’août dernier après des discussions entre le ministère de tutelle et le banc syndical. Elle sera officiellement mise en œuvre à la fin du mois d’octobre. Est-ce que les nouveaux retraités en seront aussi bénéficiaires, Ludovic Liandja ne rassure pas. Mais elle attend que la caisse « améliore les conditions de vie des enseignants retraités ».

Une attente mitigée dans les provinces

A Bukavu, dans l’Est du pays, deuxième étape de cette opération, l’espoir ne fait pas vivre les enseignants éligibles à la retraite. Symphorien Mushera ,70 ans traine une carrière de cinquante ans. Les informations venues de Kinshasa au sujet des allocations ne le rassure pas. « On parle d’un frigo et d’une somme de 2500 dollars, est-ce vraiment une retraite honorable ou c’est une façon, pour le gouvernement, de se débarrasser de gens ? » s’interroge-t-il.

Comme Symphorien, les retraités seront remplacés par une nouvelle génération. Mais pour Symphorien, cela n’augure pas un bel espoir pour « les nouvelles unités. « l’Etat congolais est incapable d’envoyer les gens à la retraite », souligne le septuagénaire.

Parmi ces nouvelles unités figure Inès Ilunga, 20 ans. Elle enseigne dans une école primaire à Kolwezi dans le Lualaba. Après une année dans le métier, Inès est passionnée.  Si elle reste confiante quant à la relève, la jeune dame ne cache pas ses inquiétudes face aux conditions sociales de l’enseignant congolais. « Je me demande pourquoi les enseignants ne sont pas bien payés dans notre pays, toutes les autorités du pays sont au moins passés  entre les mains d’un enseignant. » regrette –t-elle.

Le processus de mise à la retraite concerne 87.000 enseignants. Selon les prévisions du ministère de l’EPST, il concerne 1500 enseignants chaque mois. L’opération pourrait donc prendre plus de 4 ans.

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