Les entrepreneurs congolais plaident pour un accompagnement plus efficace© AFP
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Les entrepreneurs congolais plaident pour un accompagnement plus efficace

Les initiatives privées de demande de création des sociétés ou d’établissements se sont multipliées en République démocratique du Congo depuis la dernière décennie. Si les chiffres sont constamment en hausse selon l’agence nationale pour la promotion des investissements (ANAPI – 3320 entreprises créées en 2020), les statistiques sur la création réelle d’entreprises au guichet unique entre mai 2013 et mai 2020, tourne en moyenne autour de 1000 depuis 10 ans. Chaque année, des entreprises de toute taille naissent pour pallier à la crise économique et d’emploi que traverse le pays. Selon la Banque mondiale, les petites et moyennes entreprises qui ont 6 ans d’existence et plus contribuent à l’emploie à hauteur de 60% dans le pays.

L’article 15 (populaire) a été vulgarisé en chanson par un artiste à succès dans les années 80 à Kinshasa. Il se résume en quatre mots : « Débrouillez- vous pour vivre». Il est depuis devenu un état d’esprit qui caractérise une capacité pour les congolais d’entreprendre.  Deux congolais sur trois ont déjà tenté de se lancer dans l’entreprenariat (source). Fonctionnaires, étudiants, diplômés sans emploi s’y mettent, avec des fortunes diverses.

 Financement difficile, gestion aléatoire

 Malgré leur nombre impressionnant, la majorité des initiatives privées évoluent dans l’informel. Ce qui les empêche de devenir une base pour un développement durable du pays. Les entrepreneurs connaissent également la difficulté d’accès aux financements, font face à une fiscalité méconnue (et/ou ignorent), tracasseries des services publics qui mettent à mal leur croissance. 

 Josiane Nzeba, entrepreneure kinoise dont l’activité est centrée sur le prêt-à-porter, accessoires de mode et décoration à base de pagnes, a célébré avec faste, les 5 ans de son entreprise lors d’une soirée aux allures de Fashion Week. Elle évolue sur financement propre. Grâce à des formations organisées par des structures privées, elle a pu s’affirmer comme actrice dans son secteur. 

 « Le fait de participer à des rencontres avec d’autres femmes, nous a permis de réfléchir autrement. Les réseaux ça aident beaucoup. En côtoyant d’autres entrepreneures, on se sent soutenu», affirme Josiane qui considère ses clients comme les seuls bailleurs de JN Design, son entreprise. Elle reste en quête de financement dans le but de produire à grande échelle.

 Des jeunes entrepreneurs sont souvent sous informés, peu structurés, l’entrepreneuriat est plus une question de survie que de création des valeurs, richesses. A Matadi, le Réseau des jeunes entrepreneurs au Kongo central, une organisation privée vise à créer un fonds d’investissement, en vue d’appuyer ses 150 membres (micro, petites et moyennes entreprises).

 «Nous les formons à mieux gérer leurs entreprises. En réalité, nos opérateurs économiques ont un problème de gestion. Nous leur venons en aide également face aux tracasseries administratives en jouant le rôle d’intermédiaire. Ils ont ce qu’ils veulent à l’arrivée », Mitterrand Nkelani, secrétaire exécutif de la structure prêche aux entrepreneurs la responsabilité fiscale et la diversification de l’économie.

Le secteur touristique en RDC offre plusieurs opportunités d’affaires. Mais il reste parmi les moins occupés par les entrepreneurs  au regard du potentiel offert. « La RDC c’est plus de 400 sites touristiques. La majorité de ces sites, ont un problème d’accessibilité ou d’insécurité. Mais il y en a autant qui sont aussi accessibles. L’Etat assure la sécurité, la législation mais en termes d’opérations ceux qui doivent être au premier plan ce sont les entrepreneurs privés», note Carmel Karmel Kawpabwa Coordonnateur de Tourisme RDC.

Pour cet entrepreneur, le tourisme est une matière première qui peut ouvrir à d’autres activités mais pour cela il convient de faire plus de promotion du tourisme au niveau national,  d’arrêter avec ce qu’il qualifier de « tracasseries touristiques » en revoyant entre autres certaines restrictions publiques  et en facilitant le visa touristiques aux étrangers. « Nous avons un budget aujourd’hui de 10 milliards de dollars si 1 milliards pouvait provenir du secteur touristique comme dans d’autres pays, cela changerait beaucoup de choses…».

A Kisangani, dans l’Est du pays une panne électrique a plongé la province dans le noir pendant près de quatre mois. Plusieurs activités de production et transformation ont tourné au ralenti. Certaines ont vu leurs propriétaires mettre la clé sous le paillason. «Nous nous approvisionnons en carburant pour fonctionner mais ça fait une semaine que nous ne parvenons plus», confie un entrepreneur dans l’informatique et production audiovisuelle.

L’Etat à la rescousse

Le Projet d’appui au développement des micros, petites et moyennes entreprises (PADMPME) initié par l’Etat congolais et mis en œuvre par la Banque mondiale, est financé à hauteur de 100 millions de dollars. Il vise l’augmentation des revenus des PME par un processus qui part de la formalisation des structures informelles sélectionnées, formation à l’octroi des financements. « Ces financements conduisent à l’épanouissement de l’entreprenariat congolais qui  nous conduit vers la création d’une classe moyenne» note Odon-Charles Mubiala, spécialiste en MPME au Projet.

En accordant le financement directement aux PME, ce projet vise à résoudre le problème d’accès au marché financier par l’établissement d’une relation de confiance entre les petites entreprises et les Banques. Du point de vue technique, le but est d’amener ces entreprises à assurer une production selon les normes en vue d’être éligibles, performantes au niveau local et mondial. Le projet est implanté à Matadi, Kinshasa, Lubumbashi et Goma. Au moins 430 PME existantes ont déjà bénéficiés d’un financement du PADMPME, 963 jeunes autres entrepreneurs de Kinshasa, Lubumbashi, Matadi et Goma, ont individuellement reçu un appui financier de plus de ou moins 22 milles dollars comme fonds de démarrage et de croissance de leur PME.

Ce projet d’appui au développement des micros, petites et moyennes entreprises va s’étendre à une dizaine d’autres villes en 2022, après adoption à Kinshasa, de son plan de travail budgétisé pour cette année.