🎧 Contexte : une vidéo de 2022 présentée comme une colère des militants de l’UDPS face à une condamnation « légère » de Joseph Kabila

Depuis le 30 septembre, une vidéo agite les réseaux congolais, présentée comme une manifestation de colère des militants de l’UDPS contre la condamnation de la Haute cour militaire dans le procès contre Joseph Kabila, jugée « légère ». Nos vérifications prouvent qu’il s’agit d’anciennes images, tournées en 2022, détournées de leur contexte pour tromper l’opinion.

Des militants du parti présidentiel dispersés par des tirs de sommation. Si la vidéo est authentique, elle ne montre pas un événement récent lié à la condamnation de Joseph Kabila. Il s’agit d’un détournement d’images, une pratique courante de désinformation consistant à réutiliser des contenus réels dans un autre contexte souvent dans le but de tromper ou de manipuler. 

Dès le visionnage, un détail a attiré l’attention de Vunja Uongo, la cellule de vérification des faits du Studio Hirondelle RDC: le logo de 7sur7.cd qui apparaît dans la séquence, laissant penser que c’est le média en ligne qui a publié ce contenu. Pourtant, une vérification minutieuse de ses plateformes entre le 25 septembre et le 3 octobre n’a révélé aucune trace d’une telle vidéo.

Les détails qui trahissent le détournement

Une recherche d’image inversée à partir de captures de l’élément a permis d’identifier des séquences montrant la même scène, filmée sous d’autres angles et publiée le 15 janvier 2022.  Avec cet élément, un second monitoring ciblant les archives de janvier 2022 du média 7sur7.cd a permis de retrouver la vidéo originale, titrée : « Crise à l’UDPS : la police disperse les militants pro et anti-Kabund devant le siège du parti ». À cette date, des heurts avaient éclaté devant le siège de l’UDPS à Kinshasa, après l’exclusion de Jean-Marc Kabund-A-Kabund, alors président du parti. Interrogé par Vunja Uongo, Prince Mayiro, l’un des responsables éditoriaux de 7sur7.cd, a confirmé que le média n’avait pas récemment publié cette vidéo, dénonçant un usage frauduleux de ses contenus.

Aussi, plusieurs éléments visuels prouvent également que la vidéo n’est pas récente. En 2022, un seul panneau du mur du siège de l’UDPS portait l’inscription « UDPS ». Trois ans plus tard, le siège du parti présidentiel a subi une cure de jouvence avec, désormais, trois panneaux affichent cette mention.

De plus, aucune manifestation n’a été signalée le 30 septembre 2025 devant le siège du parti. Ce jour-là, l’UDPS organisait un événement de réconciliation entre Augustin Kabuya, secrétaire général, et Deo Bizibu, secrétaire général adjoint. Au cours de cette rencontre, aucune mention sur le procès Kabila n’a été faite.

Peine de mort, la sentence la plus élevée du droit congolais

Après avoir dirigé la RDC entre 2001 et 2019, Joseph Kabila a été condamné par contumace à la peine de mort pour complot et trahison. Il s’agit de la plus lourde peine en droit pénal congolais. Il doit aussi verser plus de 30 milliards de dollars de dommages et intérêts à l’État congolais, aux provinces du Nord et Sud-Kivu et aux associations de victimes. 

Cependant, aucune exécution n’a eu lieu en RDC depuis 2003, même si le gouvernement a levé le moratoire sur la peine de mort en 2024. Kabila, actuellement en exil, a rejeté les accusations dans une tribune. Après le verdict, le Front commun pour la Congo (FCC) a dénoncé une « tragi-comédie » alors que l’ONG Human Rights Watch a constaté un « simulacre de justice ». L’ancien chef d’État conserve la possibilité de saisir la Cour de cassation, mais uniquement pour contester des irrégularités de forme.

Cette désinformation illustre une nouvelle fois l’usage fréquent d’anciennes vidéos pour manipuler l’opinion. Avant de partager un contenu, il est essentiel de vérifier sa date, son contexte et sa source.

La rumeur de la semaine est une rubrique pour décrypter les fausses informations qui circulent sur nos réseaux sociaux et au sein de nos communautés locales sur le terrain.