La levée du couvre-feu sanitaire ne fait pas l’unanimité en RDC© GUERSHOM NDEBO/AFP
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La levée du couvre-feu sanitaire ne fait pas l’unanimité en RDC

La pandémie n’est pas terminée même si certaines mesures sont allégées. C’est le message que les autorités répètent à l’intention de la population. Celle-ci est donc appelée à poursuivre la lutte contre la Covid-19, malgré la fin du couvre-feu le 14 février 2022. Mais la décision de Kinshasa est accueillie différemment.  Si les uns saluent la fin d’une restriction, d’autres redoutent une augmentation de cas. L’autre point qui divise, c’est le maintien de cette mesure dans les deux provinces sous état de siège.  

La vie nocturne reprend peu à peu à Kinshasa. Pour ce premier week-end d’après couvre-feu, ces kinois se sont donnés rendez-vous sur l’avenue Mushie, dans la commune de Lingwala, en plein cœur de la capitale congolaise. Une forte musique est au rendez-vous dans cette terrasse. Quelques places sont vides. Sur la table, on peut apercevoir des verres de bière. A quelques mètres d’ici, Kerène, vient de recevoir un coup de fil. Elle doit rentrer à la maison. Sinon, elle aurait mis encore quelques temps. Il sera 23 heures dans une dizaine de minutes. Sur la route, elle est l’une des rares à porter de masque. Pour elle, le couvre-feu était un mal nécessaire.  »Quand on sortait, on se précipitait pour regagner la maison. Même les criminels qui opèrent la nuit étaient obligés aussi de se conformer à la mesure », raconte la jeune dame.

En cette période de pandémie, elle n’entend pas relâcher le respect des mesures barrières.  » Je ne perds pas de vue… Même dans un night-club, je dois me protéger avec le masque. Je peux l’enlever juste pour manger ou boire’’, nous confie-t-elle, avec sourire.

Sur la même avenue, dans une autre terrasse, une trentaine de personnes suivent un match de football. L’ambiance est vive. Sur la question de la levée du couvre-feu, ce quadragénaire dit ne pas être surpris.  »Seul Dieu protège… C’est la promiscuité dans des marchés et autres endroits publics qui causent la maladie. Sinon elle sera toujours loin de nous », affirme-t-il.

Gestes barrières et vaccination toujours recommandés

Nous rencontrons docteur Michel Muvudi, médecin, spécialiste en santé publique et membre de l’équipe de riposte contre la Covid-19. La fin du couvre-feu n’est pas synonyme à la fin de la pandémie, prévient-il. ‘’Quand on lève ou quand on allège les mesures c’est juste pour permettre à certaines activités de se mettre en place…Cela n’exclut pas que d’autres mesures de prévention continuent, notamment le respect des mesures barrières ou l’accès à la vaccination’’, explique-t-il, avant de préciser que même si le pays enregistre une baisse du nombre de cas, il y a tout de même des cas.

Respect des mesures barrières et vaccination sont deux recettes que propose également le Ministre provincial de la santé du Kasaï-Central, Félicien Tshisekedi. Dans les rues de Kananga, la capitale provinciale, les points de vue divergent au sujet de la décision de lever le couvre-feu. Les uns saluent, d’autres regrettent.

Risque d’une montée de propagation du virus ?

‘’ Ca n’était pas une bonne idée que de lever le couvre-feu, puisque la maladie à coronavirus circule encore, elle peut encore continuer à se propager au sein de la population’’, déplore cette jeune habitante de Kananga. Mais il y a aussi ceux qui en avaient marre du couvre-feu comme ce gérant de l’un  des night-clubs les plus fréquentés de la ville. ‘’Avant l’instauration du couvre-feu, on pouvait réaliser jusqu’à 450.000 francs congolais par jour. Mais avec le couvre-feu, on est descendu jusqu’à 100.000 ou 150.000’’, confie Mukas. Il entend maintenant maximiser ses recettes. Mais pas seulement. Il veille également à la santé de ses clients. Chacun doit porter son masque et se laver les mains avant de franchir la porte d’entrée, nous précise le gérant.

Nous nous rendons dans l’Est du pays, précisément à Goma, dans le Nord-Kivu. Le Nord-Kivu et l’Ituri, sous état de siège depuis mai 2021 ne sont pas concernés par la levée du couvre-feu. Mais ça n’a pas empêché des habitants de réagir à la décision du gouvernement central. A Goma aussi, les avis sont partagés.

Lever le couvre-feu partout

Il y a d’abord ceux qui s’opposent au maintien de la mesure dans les provinces sous état de siège dont le Nord-Kivu alors que le couvre-feu était décrété pour des raisons sanitaires. ‘’Il n’y a pas un coronavirus pour la partie état de siège et un autre pour la partie qui n’est pas sous état de siège’’. ‘’Nous recommandons au Président de la République de lever cette mesure aussi ici à Goma’’, déclarent deux habitants.

Il y a ensuite ceux qui protestent contre la levée de la restriction alors que les circonstances l’ayant motivée demeurent, en l’occurrence la pandémie de Covid-19. Un autre groupe c’est celui de ceux qui étaient favorables à la levée du couvre-feu tout en demandant aux autorités de renforcer la surveillance.

A la société civile locale, on s’apprêtait déjà à l’après-couvre-feu. Son vice-président sensibilisait déjà la population sur le respect des mesures de protection contre le virus. Batundi HANGI Vicar appelle également le gouvernement à renforcer la sensibilisation des masses.

Et les autorités le rappellent. La maladie n’est pas finie. Le couvre-feu est levée mais d’autres mesures préventives demeurent, à savoir le port de masque, la distance physique et le lavage des mains avec du savon ou une solution hydro-alcoolique. Elles préconisent aussi la vaccination.